Inutile d'en rajouter sur le caractère prémonitoire des bouquins sortis du
Think Tank Clancy : son laboratoire de remue-méninges tourne à plein régime mais il semble désormais que ses productions soient hélas lus plus attentivement par les groupes terroristes islamistes que par les *spécialistes* du Pentagone ou de la Maison-Blanche.
Actualité mise à part, par son style, ce volume ne détonne pas dans la série : de tous les "produits dérivés" de Clancy,
Power Plays* est de loin le plus violent. Avec, là aussi un démarrage sur les chapeaux de roues qui plonge le lecteur aussitôt dans l'action : 7 octobre 2001, des terroristes répandent discrètement partout dans le monde un virus mortel qui infecte toute l'humanité... Jusque là, on pourrait croire à une resucée du "Fléau" de Stephen King ou de "
Rainbow Six". A un détail près, qui change tout : le virus est dormant et seule l'injection de microcapsules contenant des protéines spécifiques permet de l'activer. Bref, si le titre n'avait été pris, on aurait pu titrer l'épisode "Quand le Dormeur s'éveillera".
L'idée est d'une astuce diabolique puisqu'elle permet de "cibler" précisément les victimes et de se livrer ensuite au plus immonde des chantages : le mal n'apparaît que lorsque plusieurs facteurs déclenchant sont réunis et, qui plus est, il ne touche que des individus ou groupes d'individus au génome bien spécifique. Bref, du génocide sur mesure et parfaitement ciblé... une aubaine pour les factions politiques, mafias et autres extrémistes de tout poil qui se sont bien entendu rués sur le fournisseur, en l'occurence le méchant de la série (depuis l'
épisode précédent), l'immonde et insaisissable "Chat sauvage". Ses clients: antisémites, suprématistes blancs (déjà aperçus dans
NetForce 4, extrémistes noirs, fondamentalistes musulmans et jusqu'aux hommes d'affaires ou promoteurs immobiliers pressés de se défaire de rivaux ou de locataires encombrants, sans parler des clans rivaux des cartels de la drogue... Bref, on se bouscule au portillon. Y en aura-t-il pour tout le monde ?
On regrettera juste que parfois le rythme se ralentisse. La faute en revient aux tics habituels à ce genre littéraire qui plombent l'action : présentation et retours obligés sur les personnages et le contexte de la série - Roger Gordian et ses sempiternels problèmes familiaux et professionnels, historique d'Uplink et résumé des épisodes précédents, sans oublier Thibodeau, Megan Breen, Pete Nimec et consorts avec leurs divers états d'âme... (du reste, inflation traditionnelle de toutes ces sagas à rallonge, le tome 4 fait carrément 100 pages de plus que les précédents.)
La tension remonte toutefois un brin quand Roger Gordian est à son tour atteint par l'infection. Bien évidemment, cela motive d'autant plus l'ensemble du personnel d'Uplink pour résoudre l'énigme et sauver la vie du patron... surtout quand ils découvrent que le coupable pourrait bien être une taupe infiltrée dans le personnel de sécurité.
Même si l'on peut regretter que le propos se réduise rapidement, de la menace d'une épidémie mondiale
(*) à un drame individuel d'envergure bien réduite (« Qui sauvera Roger Gordian ? »), par la faute de la vengeance personnelle d'un ponte sud-américain de la drogue, voici dans l'ensemble un bouquin qui se tient, grâce à une idée de base réellement machiavélique traitée sur le mode du suspense non sans un certain brio.
A propos de suspense, précisons que le récit s'achève le 23 novembre 2001. Comme ça, on
sait au moins (d'après Clancy alias Preisler) le temps minimum qu'il nous reste à vivre.
Power Games est une série imaginée par Tom Clancy et Martin Greenberg, écrite par Jerome Preisler.
Fiche originale rédigée le 13/9/2000. Mise à jour le 20/10/2001. Epreuves corrigées le 21/11/2001. Bouquin en librairie en janvier 2002.