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Fiche bibliographique



Richard Clarke
CONTRE TOUS LES ENNEMIS :
Au cœur de la guerre américaine contre le terrorisme

(Against All Ennemies)
traduit de l'américain par Jean Bonnefoy, Laurent Bury et Pierre Girard

ÉDITIONS ALBIN MICHEL
366 pages | juin 2004 | 20,90 €
[VO : 306 pages | ISBN 067432-6024-4 | mars 2004 | Free Press]


Against All Enemies Contre tous les ennemis Il y a quelques mois encore, seuls les spécialistes connaissaient le nom de celui que d'aucuns qualifiaient noin sans ironie (surtout les journalistes, méfions-nous des journalistes) de "tsar de l'antiterrorisme" : Richard Clarke.
 
Richard Clarke a réussi l'exploit, qui n'est pas mince, de servir dans la haute administration américaine sous quatre présidents successifs (Reagan, Bush Père, Clinton, Bush fils) et surtout d'être le chef de l'antiterrorisme sous les deux derniers gouvernements (Clinton et Bush), jusqu'à sa démission en février 2003.
 
Dans ce livre brûlot mais parfaitement argumenté, il explique comment l'Amérique s'est constamment fourvoyée dans ses pistes de lutte antiterroriste, minimisant la menace d'Al-Qaïda et, au contraire, privilégiant contre tous les éléments fournis par le renseignement, la piste irakienne et celle des armes de destruction massive. C'est que, explique Clarke, l'administration Bush est tenue par des faucons - Rumsfeld, Wolfowitz, Rice - qui font passer l'idéologie (et l'obsession maladive contre Saddam Hussein et l'"Axe du Mal") devant les faits concrets : l'existence d'Al-Qaïda, la dissémination de nouvelles formes de terrorisme pas forcément high-tech, le fait que les États-Unis ne sont plus un sanctuaire...
 
Au passage, l'auteur redore le blason de Bill Clinton injustement décrié par ses détracteurs (et pas qu'eux), en montrant que c'est sous sa présidence que le terrorisme anti-américain a fait le moins de dégâts et que les États-Unis sont sortis de leur superbe tour d'ivoire isolationniste pour à nouveau s'impliquer dans le concert des nations sans pour autant se placer en donneurs de leçons et en exportateurs de leur idée de la démocratie (par la force, s'il le faut).
 
Tout l'intérêt du livre est de montrer que ces impérities et ces errements de l'administration américaine remontent à bien des années et plusieurs présidents qui n'ont pas vraiment compris le virage historique de l'effondrement du communisme et de la fin de la Guerre froide : les années d'après Reagan sont en quelque sorte leur prolongement, celles d'une fin irénique de l'histoire où toute menace d'envergure aurait disparu et où l'Amérique triomphante serait à jamais protégé derrière son bouclier économique et militaro-industriel. Il a fallu pourtant très vite déchanter (attentats des ambassades d'Afrique, USS Cole, puis plus tard, 11 septembre...) mais le mauvais pli était pris.
 
À ce titre, il est intéressant de rapprocher ce livre d'un autre ouvrage éloquent, écrit lui aussi par un Américain "dans la place", les mémoires d'Eric L. Haney, sur la force Delta, la célèbre unité antiterroriste américaine : le constat désabusé d'Haney sur les errements sur le terrain et les erreurs tactiques (mais aussi stratégique), rejoint celui, caustique et cynique, de Clarke sur les errements stratégiques et géopolitiques de l'administration et des hautes sphères gouvernementales. Enfin, dans la foulée, on ne pourra lire qu'avec un intérêt renforcé la première tentative romanesque de l'auteur, parue un an plus tard.

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Contre tous les ennemis (Albin)  


Les exégètes tatillons, bibliothécaires scrupuleux, fans gravement atteints et autres maniaques du C-V exhaustif trouveront ici une liste bibliographique (à peu près) complète.

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