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FROM : von.beck@orange.fr
TO: jean.bonnefoy@online.fr
SUBJECT : commentaires
DATE : At 11/04/01 08:36, you wrote:

MESSAGE :

Un roman ressemble à un château en Espagne et à une auberge du même pays : l'auteur est libre de le bâtir selon ses rêves pour que le lecteur y trouve ce qu'il y a apporté. Et si l'on devait poursuivre la métaphore, l'on pourrait comparer chaque roman aux différents types de châteaux. Auquel cas La Forteresse de métal serait un château baroque à l'image de ceux de Louis II de Bavière. Jean Bonnefoy et Gérard Briais y ont mis toutes leurs passions, de la musique à l'histoire, de l'informatique à la philosophie, et le résultat est riche, voire même indigeste.
A commencer par la structure même du roman : loin d'être une simple histoire de voyage temporel - chose qui est rarement simple en science-fiction - La forteresse est un roman transtemporel se déroulant à trois dates différentes, en 1436, en 2013 et en 2019, qui se fondent à la fin du roman en une déchirure du temps et du lecteur.
Le parallèlisme temporel et la belliqueuse et pesteuse période du XVe siècle n'est pas sans rappeler les aventures d'Eymerich par Valerio Evangelisti. De toutes façons, la guerre de Cent Ans a toujours eu les faveurs des écrivains de S.F. (cf. Les prisonniers du temps de Michael Crichton et Le grand livre de Connie Willis) qui doivent être légèrement névrosés pour choisir une telle époque.

Cette structure rend le livre irracontable. Disons simplement qu'une entité gazeuse nommée Ordo, arrivée sur Terre avant l'Homme, s'est décidé à intervenir dans les destinées de l'humanité à plusieurs époques. Au XVe siècle, les chevaliers de l'ordre de St-Jean de Jérusalem entreprennent de constituer des coffres-forts où ils entreposent le savoir humain. En 2013, Lara et son rocker de petit copain G-J, qui semble en savoir beaucoup plus qu'il n'en dit, se trouvent confrontés à des déphasages temporels tandis que la dame reçoit des e-mails datés du XVe siècle. En 2019, dans un monde dominé par les ludiques, transnationales vivant du plaisir procuré à la population, Doña McDonnell, PDG d'une société de mercenariat, se voit attaquée de tous côtés par une certaine Joanna Winge, membre d'un Ludique, tandis que sévit dans le monde virtuel un virus qui absorbe les personnalités des joueurs. Tous ces éléments convergent vers un concert au coeur de l'Auvergne destiné à protéger le site d'un vieux château du XVe. La vraie question est de savoir si la musique rock du début du XXIe a l'heur de plaire aux guerriers du XVe...

On aura compris le récit est loin d'être simple et facile à suivre. Il est très difficile de comprendre où les auteurs veulent emmener le lecteur - à part à l'asile - d'autant plus que le récit a un large goût d'inachevé, étant le premier volume d'un cycle, celui d'Ordo.
A cela s'ajoute la forme du propos où abonde les explications techniques tant sur le monde virtuel que sur l'architecture ou l'histoire médiévale, sur le Jazz ou le rock tantôt progressif tantôt métal. Il est vrai que les auteurs connaissent leur sujet et les références apparaissent clairement, si elles ne sont citées dans le récit, en fin de volume dans les remerciements où cohabitent les historiens Duby, Le Roy Ladurie, Le Goff et Heers, les musiciens et chanteurs, King Crimson, Iron Maiden, Tony Levin (déjà cité avec King Crimson), Frank Zappa et Mylène Farmer, les philosophes, en les personnes de Schopenauer et Francis Bacon...

Bref, La Forteresse de métal multiplie références, au risque du pédantisme, et clins d'oeil, comme Wilton Dismay, fondateur d'une société ludique de dessins animés, ou le ludique Spiel-LuXs ou simplement l'héroïne Lara (Croft ?). Le roman est indubitablement baroque et cumule les genres. Il est cyberpunk et voyage temporel mais il est aussi inspiré par Le pendule de Foucault d'Umberto Eco.
Le résultat n'est pas ennuyeux et ce n'est pas un livre qu'on ne finit pas mais il est difficile de le lire quelques heures d'affilées sans s'en lasser. Reste qu'il est attachant et que l'on attend la suite avec impatience... et crainte.
Signature : http//wagoo.free.fr/
Re:
Bravo pour cette lecture pointue du bouquin. Et malgré la complexité que tu redoutes et regrettes à la fois (Cela dit, merci pour l'hommage, c'est vrai, on a étudié tous les deux Umberto Eco, du temps où on était encore étudiants et lui pas encore romancier), tu as réussi à le résumer aussi bien qu'une attachée de presse. On va peut-être t'engager...
En tout cas, ta TGBSF est déjà entrée dans nos liens.

Juste une remarque, non, Lara n'est pas un hommage à la cyberLara de TombRaider. Dans le director's cut du récit, on apprend du reste l'origine de son prénom, par ailleurs également révélée sur ce site. Va dans l'index à l'entrée Lara VanDyken et clique au bon endroit.
Signature :JB